Dispositif "Parcours Mon Psy"
Julie Nicaise
11/29/20255 min read


Le dispositif « Mon Soutien Psy » (anciennement « MonPsy ») a été mis en place par les pouvoirs publics pour faciliter l’accès à un accompagnement psychologique remboursé.
Son objectif affiché est simple : permettre aux personnes présentant des difficultés psychiques légères à modérées d’accéder à un psychologue gratuitement ou presque, dans un cadre standardisé.
Cette démarche part d’une intention louable : rendre la santé mentale plus accessible, dans un contexte où la demande est croissante et où les consultations non remboursées peuvent représenter un frein important.
Cependant, ce dispositif a aussi suscité de nombreux débats au sein de la profession. Cet article vise à présenter de manière neutre les éléments essentiels pour comprendre ce dispositif, ses enjeux, et le choix professionnel qui est le mien aujourd’hui.
1. Pourquoi le dispositif a été créé ?
Le gouvernement a lancé MonSoutienPsy pour répondre à plusieurs constats :
de plus en plus de personnes renoncent à une prise en charge faute de moyens ;
la santé mentale est devenue un enjeu public prioritaire ;
les délais d'accès aux psychiatres se sont allongés ;
il n’existait aucun cadre de remboursement systématique pour les psychologues.
L’intention de départ est donc positive : promouvoir l'accès aux soins psychiques, réduire les inégalités, et encourager la prévention.
2. Les points positifs du dispositif, souvent mis en avant
Parmi les avantages fréquemment cités :
✔ Accessibilité financière accrue
Le dispositif permet un remboursement (total ou partiel selon la couverture) pour un nombre limité de séances.
✔ Reconnaissance institutionnelle du métier
L’existence même d’un remboursement pour les psychologues marque une avancée dans la reconnaissance des besoins psychiques comme besoins de santé à part entière.
✔ Standardisation de l’accès aux soins
Les critères d’éligibilité sont clairs : difficultés psychiques légères à modérées, prises en charge brèves, séances cadrées.
✔ Simplicité pour le patient
Il est possible de consulter directement un psychologue partenaire sans nécessairement passer par un médecin.
3. Les critiques et nuances soulevées par différents professionnels
Les discussions autour du dispositif restent houleuses, notamment pour quatre grandes raisons :
❖ 1) Un cadre administratif très contraignant
Beaucoup de psychologues considèrent que les obligations imposées (comptes rendus, rétroaction vers un médecin, nombre de séances limité, cadrage strict des interventions) ne correspondent pas à la réalité d’une pratique psychologique éthique, souple, ajustée au patient.
❖ 2) Une rémunération jugée insuffisante
Le tarif unique fixé par l’État (non indexé, en dessous du tarif libre standard, passé toutefois de 25 euros à 50 euros, tarif restant en dessous des standards liés à l'inflation qui a touché l'ensemble de la société) est considéré comme non représentatif du niveau d’étude (Bac+5 minimum), de la responsabilité clinique et du temps hors séance nécessaire au suivi, puisque s'ajoute un lot d'administratif conséquent.
❖ 3) Des risques d’ingérence institutionnelle dans la clinique
Certains professionnels alertent sur le risque d’un modèle où :
des pratiques seraient imposées par des institutions non psychologues ;
des critères économiques deviendraient prioritaires ;
la liberté clinique pourrait être réduite au fil du temps.
❖ 4) Des risques d’ingérence institutionnelle dans la clinique
Les textes se limitent à dire :
maximum 12 séances remboursées par an ;
si pas d’amélioration → concertation médecin / psychiatre ;
possibilité d’un nouveau forfait l’année suivante.
⚠️ Rien n’est dit sur la poursuite du travail en dehors du dispositif — ce n’est ni interdit, ni bloqué. Cette absence de détail amène une méfiance naturelle des professionnels de la santé mentale.
Beaucoup de psychologues refusent de poursuivre ensuite, car :
la relation thérapeutique commence sous un cadre très contraint ;
le patient peut se sentir “trahi” quand le remboursement s’arrête ;
certains patients pensent alors que “12 séances suffisent” → pression implicite ;
le dispositif crée un biais cognitif dangereux : la thérapie ≠ un forfait.
Donc ce n’est pas interdit, mais c’est délicat, et l’organisation du dispositif pousse à ne PAS poursuivre, d’où les confusions.
Effets observés :
Pression sur le praticien pour faire “rentrer” un suivi en 12 séances.
Risque d’orienter les patients vers un modèle TCC court même si non adapté.
Vision “rentable” et non clinique de la santé mentale.
Risque que les 12 séances deviennent perçues comme une norme.
Perception que la thérapie est “un forfait”, ce qui est faux.
Patients convaincus que “au bout de 12 séances un problème doit être réglé”, créant de la culpabilité ou un sentiment d’échec.
Pression politique pour montrer :
“Regardez, la santé mentale coûte peu, les gens vont mieux vite.”
❖ 5) Un dispositif incomplètement adapté à la diversité des situations
Le dispositif vise les troubles « légers à modérés ». Pourtant, certains patients ne rentrent dans aucune case tout en ayant réellement besoin d’un accompagnement.
Le risque est de laisser de côté des personnes dont la situation n’est pas “assez grave” mais qui nécessitent plus qu’un protocole limité.
Ces critiques ne signifient pas que le dispositif est “mauvais”.
Elles montrent simplement la complexité d’intégrer la psychologie dans un modèle administratif et économique.
Quand la santé devient mesurée en productivité, en rentabilité, on perd le sens thérapeutique et la complexité humaine.
Et effectivement :
les pathologies complexes,
les traumas,
les dynamiques familiales,
les troubles de la personnalité,
les vécus multi-traumatiques,
les situations psychosociales lourdes
ne rentrent pas dans 12 séances.
Ce dispositif encourage involontairement une vision simpliste et quantifiée de la psyché.
4. Pourquoi il est difficile pour certains patients de trouver un psychologue partenaire ?
Plusieurs raisons expliquent cela :
très peu de psychologues acceptent les conditions actuelles (en lien avec les critiques du dispositif mentionnées ci-dessus entres autres) ;
certains praticiens craignent de perdre leur indépendance clinique ;
d’autres ont choisi de préserver le cadre déontologique, notamment le secret professionnel intégral ;
les contraintes administratives supplémentaires ne sont pas compatibles avec leur volume de pratique.
Ce n’est donc pas un manque de bonne volonté : c’est souvent un choix déontologique, et parfois un choix de protection du patient.
5. Ma position professionnelle aujourd’hui
Je suis bien évidemment favorable au remboursement des soins psychologiques, et je suis pour un modèle accessible, humain, et respectueux des besoins psychiques.
Cependant, je ne fais pas partie du dispositif “Mon Soutien Psy”, pour plusieurs raisons que j’expose de manière transparente :
• Pour préserver la liberté de pratique clinique, essentielle pour adapter le suivi à la singularité de chaque personne.
• Pour maintenir un cadre déontologique strict, notamment sur le secret professionnel (aucun rendu obligatoire à un tiers).
• Pour éviter une pratique trop restreinte ou standardisée qui pourrait ne pas convenir à certains patients.
• Pour garantir que la prise en charge reste centrée sur votre rythme, vos besoins et votre histoire, sans pression ou contrainte extérieure.
Je reste cependant attentive aux évolutions du dispositif et ne ferme absolument pas la porte à une participation future, dans un cadre qui respecterait pleinement :
l’éthique du métier
l’indépendance clinique,
la diversité des approches psychologiques
Le code Déontologique que vous pouvez consulter ici.
6. Une information actualisée
Le dispositif étant régulièrement modifié, ses conditions évoluent.
Je ne peux donc pas garantir l'exactitude en temps réel de toutes les informations retranscrites ici, car les conditions du dispositif peuvent évoluer rapidement.
Je garde néanmoins la volonté constante d’informer au mieux chaque consultant, en tenant compte :
de sa situation personnelle,
de ses besoins psychologiques,
des possibilités de remboursement existantes,
mais aussi des impacts sur la profession et sur la qualité des soins à long terme.
Pour suivre les informations les plus récentes, je recommande de consulter directement :
Le site officiel de l’Assurance Maladie – Mon Soutien Psy ici


